“ L’âge du philosopher ” a toujours
fait problème dans l’histoire de la philosophie : Calliclès
1 ,
Epicure 2 ,
Montaigne 3 ,
Jaspers 4 ,
aujourd’hui M. Lipman 5 ,
M. Onfray 6
et Luc Ferry 7
d’un côté, de l’autre Platon, Descartes 8 ,
Kant 9 ,
Hegel 10 .
S’opposent ainsi les philosophes qui pensent qu’il est possible
et souhaitable que les enfants commencent à réfléchir le
plus tôt possible, à ceux qui proclament que philosopher c’est
sortir de l’enfance, lieu et moment constitutifs de l’opinion, du
préjugé et de l’erreur.
Notes
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1
- Calliclès le sophiste soutient qu’il n’est jamais trop
tôt pour commencer à philosopher, alors que pour Platon via Socrate,
on ne peut vraiment philosopher que tard pour l’époque (Par exemple
République 7, 540a) : “ Quand ils finiront leur trentième
année, tu les tireras du nombre des jeunes gens déjà choisis
pour…rechercher, en les éprouvant par la dialectique, quels sont
ceux qui, sans l’aide des yeux ou d’aucun autre sens, peuvent s’élever
jusqu’à l’être même par la seule force de la
vérité ”.
2
- “ Dans sa jeunesse, que personne n’hésite à s’engager
en philosophie…car personne ne peut s’engager trop tôt ou
trop tard dans l’activité que procure la santé de l’âme…L’activité
philosophique s’impose à celui qui est jeune comme à celui
qui est vieux. (Lettre à Ménécée, 10, 122).
3
- “ La philosophie…on a grand tort de la peindre inaccessible aux
enfants…Puisque la philosophie est celle qui nous instruit à vivre,
et que l’enfance y a sa leçon, comme les autres âges, pourquoi
ne la lui communique-t-on pas ? …Un enfant en est capable, au partir de
sa nourrice, beaucoup mieux que d’apprendre à lire ou à
écrire ” ( Essais, I, chap. 26).
4
- Introduction à la philosophie. “ Un signe admirable
du fait que l’homme trouve en soi la source de la réflexion philosophique,
ce sont les questions des enfants. On entend souvent, de leur bouche, des paroles
dont le sens plonge directement dans les profondeurs philosophiques…ils
ont souvent une sorte de génie qui se perd lorsqu’ils deviennent
adultes”. Grothuisen affirme d’ailleurs que “ la métaphysique
est la réponse aux questions des enfants ”. Et J.F. Lyotard, dans
Le postmoderne expliqué aux enfants appelle à “
renouer avec cette saison d’enfance, qui est celle des possibles de l’esprit
” (Plon, 1969, p.9).
5
- A l’école de la pensée, De Boeck, Bruxelles,
1995.
6
- “ Je crois nécessaire d’envisager un enseignement de la
philosophie dès le primaire ”, Libération du 18/06/2001.
7
- “ Je me demande parfois s’il ne faudrait pas, dès l’école
primaire, enseigner en tant que tel l’art de l’argumentation ”
(Philosopher à 18 ans, p. 14). A. Comte Sponville déclare
de son côté : « Ces enfants qui font des mathématiques,
de la physique, du solfège, pourquoi seraient-ils interdits de philosophie
? » (Pensées sur la sagesse, carnet de philosophie, A.
Michel, 2000 p. 9) ; et il écrit chez T. Magnier un petit opuscule pour
enfants : Pourquoi une chose plutôt que rien ?
8
- “ Nous avons été enfant avant que d’être homme
”. Pour Descartes l’enfance est le temps et le lieu de l’erreur
et du préjugé (“ …dès mes premières
années, j’avais reçu quantité de fausses opinions
pour véritables…) et il faut donc atteindre la maturité
pour être capable de philosopher (“ …j’ai attendu que
j’eusse atteint un âge qui fut si mûr…Méditations
métaphysiques, 1).
9
- Kant rappelle, dans la première préface de la Critique de
la raison pure, que son travail de philosophe ne « pouvait en aucune
façon être mis à la portée du public ordinaire »
(p. 9, PUF, 1963).
10
- Pour Hegel, cela n’a aucun sens d’apprendre à philosopher
sans « apprendre la philosophie », entendez les doctrines des philosophes.
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