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Anthropologie didactique de la complexité : vers la philosophie à l’école primaire

Posted By admin On 30 novembre 2005 @ 11:11 In Quelles recherches ? | No Comments

Résumé de thèse – Nicolas Go

Cette thèse est consacrée à examiner la naissance de ce que j’ai appelé le « goût philosophique » (au sens étymologique du goût, de la saveur, du latin sapere qui a donné également le mot savoir). Elle interroge les commencements, sachant que lorsqu’on débute en philosophie, par exemple…

en classe de Terminale, on a souvent déjà commencé à philosopher depuis un certain temps, sans s’en apercevoir. A l’inverse, on peut débuter en philosophie au lycée sans jamais commencer (parce qu’on n’aura pas acquis le sens du problème). Je fais l’hypothèse d’une zone frontalière entre le philosophique et le non philosophique, entre la philosophie et l’opinion, par laquelle on entreen philosophie, comme à la lisière d’un territoire. Je conçois la métaphore d’une frontière poreuse entre les deux, un lieu de braconnage, où nous pouvons vagabonder à notre aise selon notre propre singularité. Je conteste la légitimité de ceux que je nomme les « douaniers » de la philosophie, qui lui assignent une frontière fermée, où il faudrait présenterun passeport de penseur pour être autorisé à passer.

Mais je ne crois pas pour autant que tout soit philosophie. S’il y a une frontière, même poreuse, c’est qu’il y a un territoire. C’est à la définition de cette frontière, qui n’a que rarement été explorée dans l’histoire de la philosophie, que je consacre mon premier chapitre. Je m’efforce dedélimiter une zone où vagabonder, afin de s’approcher progressivement du territoire, pour pouvoir un jour s’y orienter sans s’y perdre.

L’approche exploratoire de la philosophie implique une méthodologie spécifique, à laquelle je consacre le deuxième chapitre de la thèse. Ayant décidé de comprendre sous quelles conditions des enfants sont capables de commencer, ayant défini la carte duterritoire qu’ils sont amenés à sillonner, je m’efforce de concevoir une méthode de travail compatible avec l’incertitude de la recherche. Ne présupposant rien des capacités ou incapacités des enfants, ne connaissant rien de ce qui surgira de la recherche, je choisis d’élaborer une méthodologie « clinique indiciaire », qui permet de connaître en cheminant. Afin dem’assurer de la validité des hypothèses et des interprétations, je travaille dans un contexte collaboratif, faisant des praticiens associés de véritables partenaires de la recherche (et non simplement un « terrain »), et j’utilise les techniques nouvelles de la didactique générique qui me semble permettre des analyses rigoureuses et très critiques. Enfin, parce quel’activité philosophique n’est pas examinée comme une discipline scolaire, et parce que la philosophie porte sur le réel dans son ensemble, je travaille à la théorisation d’une approche complexe (dernier chapitre), dont les deux principales vertus sont de relier ce qui est d’ordinaire séparé et de favoriser les évolutions créatrices (seuil critique loin de l’équilibre,émergences, régime à longue portée…).

Les chapitres intermédiaires sont consacrés aux analyses du matériau empirique : deux analyses à partir de pratiques expertes (Michel Tozzi et moi-même), afin de présenter –et mettre à l’épreuve – le modèle théorique que j’ai élaboré, puis une multiplicité d’échantillonstrès diversifiés de DVP. L’objectif est de tenter de comprendre comment pensent les enfants, quels sont les gestes d’enseignement favorables à l’émergence de la pensée philosophique, quelles sont les sources anthropologiques de la philosophie savante, à laquelle je ne cesse de me référer. J’espère pouvoir contribuer à préciser selon quelles conditions de la philosophie est possible avecdes enfants, et, par extension, pour n’importe quel commencement. Je ne sépare pas ces problèmes de la vie en général puisque ce que je vise, c’est, conformément à la tradition philosophique antique, un « art de vivre ». Cette thèse n’est elle-même qu’un commencement, qui devrait pouvoir inaugurer une recherche à long terme, élucidant le sens d’apprendre àl’aune du sens de vivre. La philosophie à l’école devrait pouvoir devenir dans cette perspective un véritable laboratoire du sens, qui implique aussi bien les élèves que les professeurs et les chercheurs dans une recherche (vérité, sagesse, justice, liberté) critique et indéfinie. Le problème politique surgit inévitablement à l’horizon.

J’ai choisi de baptiser ce travail« anthropologie didactique de la complexité », en interrogeant « les commencements en philosophie ».


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